Back from… Six Senses Ibiza
Essentiel !
Les bonnes choses se méritent. Il faut juste savoir les attendre ou pouvoir les atteindre. Dans le cas d’Ibiza, mère de tous les excès et terre de contrastes, il existe, bien que ses contours deviennent de plus en plus flous, une frontière encore assez nette entre le Nord et le Sud, ce dernier de par sa proximité avec l’aéroport et la ville éponyme s’offrant la fête, la verticalité et l’exubérance, le premier se réservant le calme, la ruralité comme la retenue. C’est au bout de cet autre Ibiza, l’authentique, celui qui résiste et passionne depuis des générations que le premier exemple d’une hôtellerie de chaine et de qualité vient enfin de s’implanter après des années d’attente. Sur ce chemin de conquête du Sud vers le Nord, il y avait bien eu Nobu avant lui, se confondant dans une facilité que la proximité de la ville se devait peut-être d’engendrer. Non loin, l’iconoclaste et joyeux Los Enamorados avait déjà ouvert la voix en insufflant dans la région un incontournable vent de modernité et de cohérence que limitait la modestie de sa dizaine de chambres. Mais il manquait aux amateurs de ce type d’hôtellerie un point de chute enviable et aux adorateurs de la région une taille à la hauteur, un double pari que la marque de Neil Jacobs s’est fait fort de relever en plein cœur de l’été.
Malgré des débuts forcément difficiles, avec un resort affichant complet dès les premiers jours, Six Senses Ibiza s’est pour autant vite imposé comme l’une des adresses de la saison et au-delà puisqu’il n’a d’autre ambition que d’ouvrir à l’année, parti-pris inédit sur l’île et sans doute promis à un bel avenir. Malgré la taille gigantesque de ses 116 unités, plutôt inhabituelle pour la marque, partagées entre chambres, suites-grottes et résidences, le nouveau venu n’en a pas moins compris les spécificités et les impératifs de l’ile qui l’héberge. Consciente des 300 jours annuels de soleil qui en font l’une des destination la plus ensoleillée d’Europe, de son inclination pour toutes formes de spiritualité et de reconnexion comme de son fort attachement à la terre, la marque la plus exclusive d’Intercontinental Group avait toute légitimité pour investir de manière durable et à plus d’un titre les 8 hectares de la baie magique de Xarraca jusque-là seul refuge de quelques bateaux amateurs de couchers de soleil.
Bien que visible des derniers lacets de la route y conduisant, l’imposante structure couleur d’ocre a su se dissimuler dans la roche à l’instar d’un Lily of The Valley en France, obtenant au passage le titre de premier complexe hôtelier durable certifié BREEAM aux Baléares. S’il y a encore à faire pour en masquer toutes les inflexions, la végétation ne devrait pas tarder à reprendre ses droits et à courir sur les innombrables terrasses et coursives de ce paquebot presque entièrement tourné vers la mer azuréenne. Même si la plage et le ponton qui y ont été imaginés ont pour l’heure été reportés, il y a fort à parier que l’année suivante, ces rochers plats cascadant jusqu’au rivage feront le bonheur des amateurs du bord de mer et que les bateaux en nombre accosteront avec aise. Pour l’heure, on s’en contente d’accéder jusqu’aux flots apaisés de cette baie unique sur l’ile au prix d’une marche légère de quelques minutes à peine et d’une échelle parfaitement en règle autour de laquelle sont apportés sur demande canoës ou autres paddles accompagnés d’un guide selon les jours de la semaine. L’une des spécificités du Six Senses Ibiza en dehors de sa localisation remarquable tient sans en effet à son choix quotidien et extensif d’activités propre à l’esprit resort, mais aussi et surtout à sa qualité comme à sa gratuité. Ainsi, se succèdent astronomes pour des têtes à têtes avec les étoiles en fin de diner, des thérapeutes aussi créatifs que respectés à l’instar de Nick Brewer ou Chris Connors mais aussi des ateliers de confection de cosmétiques naturels ou de délicieux pickles en plus des incontournables sessions de yoga, boxe, Hiit… bref de quoi rendre jaloux les enfants, qui y ont pourtant leur propre club, de ne pas être encore adultes. Pour être honnête, les jours ne sont parfois pas assez longs pour profiter de toutes ces activités offertes souvent ponctuées de cérémonies au soleil ou à la lune suivies de DJ sets.
Là encore, Six Senses Ibiza se veut parfaitement en phase avec l’ile, avec son énergie créative quasi mystique. Je crois que jamais un resort n’a tenté d’embrassé autant de concepts et de réjouissances sous ces latitudes. Si l’on y rajoute le Hasalon d’Eyal Shani avec son impressionnante table de partage sous les oliviers, the Orchard avec son ambiance barbecue sous les lampions, le Farmer’s market et son tracteur rutilant, le Beach cave ou le Bondst avec leurs vues sur la mer, on ne peut pas dire que le choix manque et c’est tant mieux car l’éloignement du resort favorise un certain cantonnement que l’on accepte bien volontiers par ailleurs. Certes cette profusion de chambres, d’expériences, de points de vente car j’oublie encore de mentionner la boutique à la sélection tantôt vertueuse tantôt festive avec upcycling et déguisement à la clé, engendre parfois trébuchements et hésitations inévitables dans les débuts mais gageons qu’avec le temps, chacun saura y trouver son modus operandi.
Pour l’heure, Six Senses Ibiza délivre déjà un confort absolument inégalé sur l’ile, très éloigné des “agroturismo” et maison d’hôtes initiés par Les Terrasses de Françoise Pialoux il y a 30 ans de cela. L’ile a grossi depuis mais aussi grandi, s’ouvrant à certaines folies mais gagnant également en maturité. Les chambres de ce Six Senses en sont un bon exemple conjuguant pour toutes surfaces superlatives mais aussi équipements à l’instar de ces Caves aux lits inattendus de 4 mètres équipées de baignoires centrales et de véritables bar intérieurs-extérieurs. La fête est une composante essentielle de l’île sur laquelle Six Senses Ibiza ne pouvait faire l’impasse offrant studio d’enregistrement privé, boite de nuit souterraine et bar musical tendu de voilages blancs abritant non pas un mais deux Steinway & Sons que complète un troisième exemplaire au pont supérieur de ce bateau décidément hors normes. De même, il n’aurait pas pu en aller autrement que de développer une véritable ferme biologique à l’image de ce qui a brillamment été réalisé par Andy Szymanowicz à la Granja ou de distiller de précieux moments de reconnexion entre corps et esprit par l’intermédiaire d’un spa dont la réputation n’est plus à faire.
Oui, Six Senses Ibiza résonne autant avec son époque qu’avec cette ile aux deux visages l’entrainant sur le chemin, non pas de la rédemption mais de la réconciliation avec elle-même. À coup sûr, cette dernière en sortira grandie et à même d’apaiser nos étés comme de réchauffer nos hivers.
Mots & images : Patrick Locqueneux
À partir de 595€/nuit
Surclassement selon disponibilité • early check-in & late check-out selon disponibilité • 100$ credit • petit déjeuner • accueil personnalisé