Back from… Son Blanc
De la vertu !
Après leur sublime maison à louer, Es Bec d’Aguila, le couple franco espagnol Benedicta Linares et Benoit Pellegrini rêvait d’un projet hotelier à part entière capable de témoigner, s’il en était besoin, de la sureté de leur goût mais aussi et avant tout de leur attachement à la terre Minorquine dont Benedicta est originaire. Avec à nouveau l’Atelier Du Pont d’Anne Cécile Comar à leurs côtés, ils ont prouvé depuis l’été dernier et après plus de cinq ans de travaux la pertinence de ce projet un peu fou de restaurer une finca traditionnelle dans les règles de l’art avec tout le confort moderne mais surtout une véritable démarche d’éco conception et d’auto-suffisance suffisamment inédite pour faire les honneurs d’une exposition à part entière à la Cité de l’Architecture à Paris.
Rares sont les lieux et encore moins les hôtels à s’engager autant et à parvenir à l’autosuffisance aussi bien alimentaire qu’hydraulique et thermique. Forage, citernes, panneaux solaires, puits, station d’épuration, agriculture régénérative, respect des écosystèmes, circuits courts, rien ne manque à ce projet qui dépasse le simple cadre hotelier. Son Blanc Menorca est bien plus que cela, une véritable profession de foi, un engagement fort envers la nature et le monde qui l’entoure un peu à la manière d’un Es Raco d’Arta à Palma ou d’un Aguamadera à Ibiza. Mais avec Son Blanc Menorca, on franchit un pas supplémentaire sans plus de démonstration que de revendication.
Son Blanc est avant tout pensé pour se vivre naturellement et sans effort, en harmonie avec le cycle du soleil. En apparence rien ne le distingue d’un autre hôtel, seul le paysage dans ses grandes largeurs et son indécence vient à rappeler la singularité et l’exigence du lieu, indéniablement divin. Face à pareil panorama on ne peut démériter et ne faire que s’incliner, savourer la douceur des choses et du temps qui passe. Son Blanc n’a pas d’autre ambition que celle de reconnecter chacun aux 130 hectares d’une nature vierge se déroulant par vagues jusqu’à la mer. De sa position dominante, il ne tire qu’une immense fenêtre sur la nature bercée par un soleil ardent.
Avec seulement 14 chambres, Son Blanc a bien évidement plus les allures d’une maison que d’un hôtel. Un petit bureau sur le côté de la bâtisse principale fait d’ailleurs office de réception et de conciergerie aux heures de la journée. Dans la cuisine de la maison, le matin chacun se sert au buffet et fait ses jus soi-même avec les fruits et légumes cueillis du jour, la cuisinière fait les oeufs à la demande sur un piano à l’ancienne. On est ici pour partager comme au diner qui se veut une expérience en soi avec un menu en 6-7 services fidèle au précepte “de la ferme à la table”. Le midi, sur les quelques tables dressées en contrebas de la piscine organique se joue la même partition, parfois radicale, entre feu de bois et fermentation.
A l’instar de la cuisine qui joue indéniablement la carte de la ruralité avec un twist de modernité, la décoration intérieure mélange vernaculaire sophistiqué et design tempéré, meubles de récupération et créations originales dans une palette de tons fauves du brun au jaune safran en passant par l’ocre orangé ou le rougeâtre. La terre dans toutes ses formes et ses couleurs est ici célébrée. Pour cela, les propriétaires et Anne Cécile Comar ont fait appel au meilleur de l’artisanat local. Ebénistes, céramistes, artistes textiles, menuisiers, potiers et autres artisans, pour la plupart issus de l’ile, ont mis tous leurs talents à execution pour habiller ce projet d’une touche contemporaine sans avoir à renier leurs racines. Matières claires, brutes et rugueuses, textiles de tous crins, bejmats minorquins, poutres en châtaignier, bois d’olivier, pailles tressées, pierre de Marès, terre cuite chamottée ou tout simplement chaux, argile ou plâtre ont été retenus, revêtant la plupart du temps des formes organiques pour une expérience immersive, pas toujours facile à appréhender, faute d’accompagnement.
Car, au risque de se répéter, Son Blanc Menorca ne verse dans un aucun didactisme. Son appréhension se veut aussi naturelle que sa conception. Chacun choisit d’adhérer ou d’investir le projet comme bon lui semble, de pratiquer le yoga au quotidien dans l’ancienne grange dévorée par le soleil couchant ou de simplement déambuler dans les prairies chargées de la rosée du matin. Il y a ici une fausse insouciance guidée par des années de travail et de réflexion, un sensible qui nait de l’invisible à l’instar d’un service qui préfère jouer la carte de la discrétion. Faire l’expérience de sa ruralité, participer à son cercle vertueux et s’émouvoir de la beauté de la nature environnante, sont sans doute les plus grands enseignements et atouts de ce Son Blanc Menorca empreint de douceur et de poésie, propice à toutes les retraites. On pense à ces lettres de Paul aux Philippiens les exhortant à “‘tout ce qui est vrai, tout ce qui est honorable, tout ce qui est juste, tout ce qui est pur, tout ce qui est aimable, tout ce qui mérite l'approbation, ce qui est vertueux et digne de louange, soit l'objet de (leurs) pensées.”
Mots : Patrick Locqueneux
Images : Olivier Chevalier & Patrick Locqueneux
À partir de 270€/nuit
Accueil personnalisé • early check-in & late check-out selon disponibilité • surclassement selon disponibilité