Back from… Brach Madrid
L’Espagne au coeur!
Avec la rénovation de la Villa Magna passée sous pavillon Rosewood, l’arrivée de Four Seasons, la réouverture du Ritz en tant que Mandarin Oriental Madrid, l’incursion récente d’Edition, il ne faisait déjà aucun doute que la capitale espagnole avait détrôné Barcelone aux yeux des investisseurs comme dans le coeur des voyageurs en quête de cette fameuse « movida » dont elle fut d’ailleurs le berceau. L’ouverture le mois dernier par le groupe Evok de son deuxième opus sous enseigne Brach le confirme. Madrid au meme titre que Rome, où la marque s’installera bientôt d’ailleurs, sont aujourd’hui sous le feu des projecteurs. Et comme d‘habitude, en pareille situation, le dernier arrivé raffle la mise.
« L’ouverture le mois dernier par le groupe Evok de son deuxième opus sous enseigne Brach le confirme. Madrid au meme titre que Rome (...) sont aujourd’hui sous le feu des projecteurs »
Il faut que dire qu’avec une localisation emblématique (bien que discutable) sur Grand Via, un design signé 100% Philippe Starck, un restaurant sous la houlette du chef Adam Bentalha, une patisserie sur rue, un centre de remise en forme avec piscine intérieure et un bar en rooftop ouvert aux beaux jours, Brach Madrid a de sérieux arguments pour s’imposer. Mais ce qu’il le différencie de tous les autres et le hisse peut-être comme le meilleur compromis en ville tient avant tout à la qualité de ses 57 chambres et 4 suites signatures avec terrasses, et plus spécifiquement à la cohérence d’un propos fusionnel voire syncrétique, racontant Madrid et plus généralement l’Espagne. Philippe Starck est rompu à cet exercice périlleux, tel un colleur d’affiches empilant les références, multipliant les signes, mixant les matières et les formes. De son maelström créatif sort toujours avec beaucoup d’acuité une vision poétique et signifiante du pays ou de la ville auxquels il s’attache, transcendant son style désarmais identifiable entre mille et voué pour beaucoup à la répétition. Pourtant à y regarder de plus près chacun de ses projets réussit à imposer sa différence, certes à la marge d’un cahier aux lignes désormais bien tracées. Au Brach Madrid, il a convoqué la ville bien sûr, ce forum des idées et des cultures, mais aussi toute l’Espagne haute en couleurs avec ses héros picaresques.
« Au Brach Madrid, Philippe Starck a convoqué la ville bien sûr, ce forum des idées et des cultures, mais aussi toute l’Espagne haute en couleurs avec ses héros picaresques. »
D’immenses meubles bibliothèques/présentoirs sont ainsi venus habiller les murs de chambres aux proportions très généreuses et offrir sa vision aussi érudite que prolixe d’une Espagne fantasmée. Vision que l’on retrouve dans l’encadrement de lits d’un confort comme toujours exceptionnel. Le designer poète y retrace les souvenirs fragmentés d’une vie imaginaire, de destins croisés, d’un amour perdu au détour de chemins dignes de Compostelle et des merveilles de l’Espagne. Une massue, des gants de boxe ou des haltères de ce héros imaginaire télescopent « bandurria », castagnettes et tambourin au détour d’une collection d’ouvrages érudits entre beaux-arts et littérature hispanique, des jeux de société siglés Brach s’associant au jeu mental auquel se prête le designer ainsi qu’une série de verres en cristal rappellent le côté festif du propos et de la marque tandis que des hippocampes se font lampes et que des miroirs de céramique malachite prennent des allures de poulpes tentaculaires. Comme à l’accoutumée, pots utilitaires et céramiques chinées parfois montés en lampes colonisent cimaises et consoles. Que l’œil s’y perde ou vagabonde, que le décor interroge ou réjouisse, il fait mouche et gagne son pari face à tant de chambres ailleurs, dépourvues d’âme, de charme ou tout simplement d’intention. L’intimité se gagne ici au prix de l’accumulation et de l’affection distillées de toute part à l’image des murs au papier peint scarifié de tags et autres déclarations d’amour.
« Que l’œil s’y perde ou vagabonde, que le décor interroge ou réjouisse, il fait mouche et gagne son pari »
Dans les parties communes, l’éclectisme est tout autant de mise, à l’exception peut-être du lobby, quasi monastique, placé comme toujours à l’étage et se parant intégralement de carreaux de terre cuite brute rappelant un coucher de soleil sur la péninsule ibérique ou de la Capsule, ce centre de remise en forme aux voilages blancs immaculés, ponctué d’or comme si les trésors des conquistadors y avaient échoué. Ainsi au restaurant-galerie aussi spectaculaire que chaleureux avec ses miroirs inclinés et ses plafonds de cuir tressé, ses murs lambrissés, ses assises de cuir tendus et ses abats jours plissés, une impressionnante et hétéroclite collection d’oeuvres d’art accrochée aux cimaises ou prise dans d’épaisses vitrines de verre fermées à clé, ressuscite l’esprit des cafés artistiques de l’époque où les convives désargentés réglaient leurs dettes en se délestant d’une de leurs créations. Elles se comptent ici par centaines, rendant hommage aux riches heures de la ville à son intelligentsia du Greco à Picasso en passant par Dali, Goya, Bunuel ou Garcia Lorca comme à ses musées situés à deux pas. Tout ceci n’aurait que peu d’intérêt si pareille accumulation ne répondait à la myriade de plats envoyés par la cuisine ouverte et dont les flammes échauffent les soirées. Comme à son accoutumée, le chef Adam Bentalha y balance assiettes de partage et tapas méditerranéens aussi désirables que délicieux, à l’instar des desserts présentés à l’ancienne sur plateau d’argent et régalant eux-aussi à toute heure les madrilènes déjà fans ayant adopté sans délai la pâtisserie comme le bar mitoyens.
« Brach Madrid est une indiscutable et captivante réussite dont le personnel aussi enthousiaste qu’empressé et habillé par Lacoste tient pour beaucoup. Véritable tourbillon, aussi inspirant que déconcertant mais infiniment chaleureux et convivial, il sait aussi bien parler à l’âme qu’au corps »
Brach Madrid est une indiscutable et captivante réussite dont le personnel aussi enthousiaste qu’empressé et habillé par Lacoste tient pour beaucoup. Véritable tourbillon, aussi inspirant que déconcertant mais infiniment chaleureux et convivial, il sait aussi bien parler à l’âme qu’au corps qui trouve ici autant de confort que de réconfort. Il faut peut-être revenir sur ces salles de bains aux proportions suffisamment inhabituelles pour être soulignées avec leurs douches doubles parfois, leur baignoire profonde, leur vasque xxl, qui composent de véritables salons exubérants et colorés entre ductiles tuiles vernissés et marbre brèche à la surprenante brutalité. Mais aussi sur cette inhabituelle Capsule voulue comme un lieu de transformation et d’exploration de soi sur quelques 400m2. Dotée d’un bassin de nage de vingt mètres, dont on permettra d’interroger sur le réel agrément, faute pour l’heure d’assise sur son pourtour, mais aussi d’un caisson d’oxygénation hyperbare, d’un bain glacé, d’un bain de flottaison, d’un hammam et d’un sauna infrarouge, ce spa se veut d’abord un étonnant centre de remise en forme où les salles alternent massages traditionnels et séances de récupération avec cupping, Tui Na ou Chi Nei Tsang, sessions de fitness ou de yoga mai aussi soins du visage et du corps allient savoir-faire manuel et « beauty tech » développés avec les marques myBlend et Precious de Clarins, par ailleurs nouvel actionnaire du groupe Evok. Là aussi, l’affection comme l’éclectisme vont de pair !
Mots & images : Patrick Locqueneux
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Accueil personnalisé • early check-in & late check-out selon disponibilité • surclassement selon disponibilité • petit déjeuner • 75$ de credit et plus encore