Back from… Cheval Blanc St Tropez
Passionnément méditerranéen !
En 1936, date de sa création, la route qui la borde et mène au village voyait sans doute passer moins d’équipages que de nos jours. Saint Tropez comme station estivale n’était pas encore lancée. Pourtant la Résidence de la Pinède en marquait déjà fièrement l’entrée. [title maintitle="" subtitle=" "]Aujourd’hui encore, elle demeure l’un des symboles de la presqu’île. Officiellement débaptisée depuis le 16 mai dernier lors de sa réouverture sous pavillon Cheval Blanc, la bâtisse, propriété de la famille Delion pendant les 30 dernières années, a bien connu dans le siècle quelques immanquables vicissitudes et vu l’adjonction d’une aile plus contemporaine à l’aube des années 60 avant cette dernière mue d’envergure mais il en est un, François Vieillecroze, cet architecte de la Provence et gardien de son histoire, qui a veillé sur elle sans jamais cesser de croire à sa bonne étoile. Lui, comme Bernard Arnault qui s’en est porté acquéreur au nom de LVHM Hotel Management en 2016, ont toujours su que cette localisation conserverait ce caractère aussi particulier qu’exemplaire qui lui vaut d’être toujours le seul hôtel en prise directe avec la mer doté de sa propre plage.
Le pari qui, a priori, aurait pu paraître osé s’avère désormais payant. Il ne fallait pas oublier que derrière ce mur d’enceinte et cette imposante grille de fer forgé toujours ouverte, où se rangent les belles cylindrées en un alignement parfait, se trouve un trésor que son précèdent nom ne savait cacher : une pinède à l’indéniable puissance évocatrice. Les pins centenaires et tutélaires où se réfugient les cigales n’ont pas flanché. Leurs silhouettes bienveillantes rendent la mer sur laquelle elles se superposent encore plus désirable. À l’ombre de ce cocon charmant et embaumant, chaque repas se savoure avec un égal bonheur comme si sous ces arbres tout devenait plus simple et léger. Malgré les étoiles de la table, le lieu donne à l’évidence à l’assiette un tour moins emprunté que les uniformes aux tons grèges et les chaussures en semelle de crêpe achèvent d’alléger. À l’instar de ses pinastres légendaires, elle est depuis quelques années l’autre belle surprise de ce Cheval Blanc St Tropez.
Sous la houlette du chef triplement étoilé Arnaud Donckele, récemment couronné « meilleur chef du monde » par ses pairs, cette Vague d’Or, dont je n’ai malheureusement pu cette fois-ci savourer les dernières inflexions mais apprécier le nouveau décor, scintille au firmament de la cuisine française à l’instar des flots de la Méditerranée à laquelle elle rend un hommage appuyé. Dans cette désormais heureuse coque de bois clair et de verre rappelant les oscillations du sable sous l’effet des vagues, sur laquelle veille un mural aux allures d'icône, d’élégantes tables nappées et immaculées accueillent maintenant un calice couleur aigue-marine, un galet en guise de porte couteau et une assiette en forme de coquillage renvoyant au littoral de manière joliment littérale. Dans ce paysage passionnément méditerranéen, s’invitent mille autres nuances qui rendent chaque instant mémorable à commencer par celui du petit déjeuner sous les frondaisons et les parasols blancs claquants de toute leur blancheur. Servi à la commande avec une mention spéciale pour l’impressionnant chariot des muesli, granolas et autres fruits secs dont d’inoubliables mures blanches, ce petit moment de bonheur et de quiétude en terrasse donne le premier tempo d’un servic sans égal, avec cette parfaite courtoisie qui donne l’illusion d’être à la maison et qui ne cesse qu’au moment du coucher où le service « carte blanche » se charge lors du diner de rafraichir les seaux à glace et de servir l’infusion du soir tandis que le service de couverture dispose les épais tapis de sols brodés d’un « douce nuit » à l’unisson des oreillers moelleux sur lesquels une brume est placée en complément d’une crème après-soleil Guerlain sur la coiffeuse en bois clair et laque azur. Avant de parler de ces chambres toutes uniques et pour presque l’intégralité d’entre elles tournées vers le bruissement des vagues et des pins de conserve, revenons sur ce sens du service et du détail tutoyant la perfection.
Parmi les quatre axes de différenciation de cette marque au cheval cabré, l’Art de recevoir figure certes en bonne place et peut-être avant même les notions d’artisanat, d’exclusivité ou de créativité, mais avouons que des quatre maisons existantes, celle-ci lui donne véritablement tout son sens. Le doit-on à l’extrême sympathie d’Olivier Raveyre son historique General Manager ou l’impeccable élégance d’Anne de Moro son assistante ? Sans doute y sont-ils pour quelque chose, mais force est de constater que d’un étage à l’autre de cette maison, chacun se fait fort d’apporter avec spontanéité et rigueur mêlées sa pierre à un édifice dont la maitrise paraît inébranlable. La clientèle d’habitués comme les nouveaux pensionnaires de ce havre délicieux s’en délectent immanquablement, les premiers trop heureux de retrouver les lieux inchangés en apparence. En dehors de quelques éléments extérieurs sur lesquels chacun s’accorde et qui restent à revoir prochainement et avant d’autres évolutions encore bien plus séduisantes qu’il convient de garder confidentielles, ce Cheval Blanc Saint Tropez a définitivement fait peau neuve sous la bienveillante intervention de l’ami Vieillecroze accompagné cette fois de Jean-Michel Wilmotte qu’on a rarement connu aussi bien inspiré.
Derrière sa façade aux couleurs du village dont on admire des terrasses et balcons le célèbre clocher au loin, tout a été revu avec un sens de l’à-propos et un raffinement incomparables. Décloisonné et désormais habité par la lumière, Cheval Blanc St Tropez convoque en ses intérieurs mille sources de satisfaction traversées par la modernité retrouvée d’un des artisans du Sud : Roger Capron. Heureusement exhumés à la faveur de la visite d’un amateur et collectionneur de l’artiste, les grands muraux aux bestiaires marins et l’escalier à balustres et visages de soleils ont donné l’idée de ce fil conducteur aussi joyeux qu’intelligent. De l’hommage pur et simple à la recréation, toutes les voies auront été explorées donnant ainsi naissance au plus grand ensemble jamais réuni de pièces du céramiste et de son épouse Jacotte, et offrant à l’occasion à cette maison à taille déjà très humaine une âme aussi belle que délicate. Les amateurs y verront une immanquable leçon de style, les autres, une simple (re)découverte mais tous s’accorderont à y voir là, la beauté d’un tableau infiniment méditerranéen.
Les belles œuvres du potier de Vallauris ne sont bien évidemment pas les seules à ponctuer, avec un goût extrêmement sûr, les espaces communs comme les 31 chambres et suites de ce grand hôtel nouvelle génération bercé par le murmure des pins. Bien que toutes différentes, avec de légères variations qui rappellent les impermanences des flots, ces dernières appartiennent bien néanmoins à ce même univers des bords de mer et à ce bleu des vacances, parfaites dans leurs mises et dans leur souci inouï du détail, de l’allumette juste sortie de la boite et prête à raviver la flamme au ruban griffé délicatement noué autour de câbles en disgrâce trop souvent emmêlés. Cheval Blanc St Tropez séduit aussi singulièrement que la presqu’ile qui l’héberge. Du lobby en résille de bois clair et tesselles azur en ordre dispersé comme la mer, des calepinages du bois comme le sable ondulant sous l’effet des marées, du marbre à l’effet liquide et traversé de veines d’ombres, des verres translucides aux têtes de lits outremer en passant par les galets couleur Klein, la Méditerranée trouve ici un éclat sublime et sans doute l’un de ses hommages les plus réussis.
Aussi marin que solaire, ce Cheval Blanc St Tropez se révèle sous la lumière du sud comme un enfant aux joues joliment rosies par le soleil. Partout, cette lumière filtrée par les claustras, les balustrades ou les pins, tantôt rose poudré le matin tantôt ocre d’or le soir, éclabousse les lieux projetant sur ses murs une vision de l’été idéal. Y séjourner revient à ne jamais quitter sa paire de lunettes de soleil, comme si la vie n’avait de cesse de sourire comme après ce soin délicieusement nommé « À l’ombre des pins ». Souterrain mais traversé par l’eau et les œuvres tout en poésie de Fred Eerdekens, le tout nouveau spa Guerlain dont les vestiaires portent le nom de boudoirs cache en son cœur un jardin secret, une vaste agora à ciel ouvert tendue de bois clair et plantée d’un olivier centenaire en son centre. Dégustant là quelques guimauves aux parfums rares et à l‘effigie des eaux précieuses de la marque, on savoure inévitablement la vie du bon côté, une Riviera Chic que Thierry Wasser, nez Guerlain, a imaginé en exclusivité pour les lieux à grands renforts de figues, d’agrumes, de jasmin, de bois et d’iode.
Cette senteur délicate que l’on retrouve dans ces cocons parfaits que forment les chambres, sous la forme de bougies éclatantes ou de produits d’accueil enivrants donne, comme à tout séjour chez Cheval Blanc, ce parfum d’inédit mais aussi ce petit « goût de reviens-y ». Lorsque l’on sait faire de chaque jour un rêve empreint d’une émotion que l’on croit ici aisément sincère, la certitude prend le pas sur la simple envie de revenir. Cheval Blanc St Tropez n’est pas de ceux à qui on dit adieu mais bien au revoir, peut-être parce que bien plus que celle de la riviera française, s’écrit tout simplement ici une histoire française avec le bleu en majesté, ce bleu intense dont il a fait sa signature, après le taupe des Alpes, le rose blush des Antilles ou le jaune solaire des Maldives et que la Bentley mise gracieusement à disposition des clients se charge de véhiculer jusqu’aux ruelles du village et alentours. De cet Art de vivre là, il va être aussi difficile de se rassasier que de la grande bleue.
Mots & images : Patrick Locqueneux
À partir de 675€/nuit
surclassement selon disponibilité • early check-in & late check-out selon disponibilité • 100$ resort credit • petit déjeuner • accueil personnalisé