Back from… Hotel du Couvent

Ite missa est !

Nice, sa Colline du Château, sa Promenade des Anglais, sa Baie des Anges, ses façades colorées, ses cours animés, ses églises baroques… On voudrait tout saisir de ce Sud de carte postale, les couleurs, du jaune des citrons au turquoise de la mer, les senteurs, du fumet de la Socca au parfum des roses mais aussi la ferveur de cette vie qui semble y couler de manière désordonnée et ininterrompue !  Tout cela et bien plus encore se trouve littéralement à la porte d’un lieu pourtant sis à l’écart du monde, un lieu resté longtemps dans l’ombre et qui vient d’écrire une nouvelle page de son histoire. Ce lieu n’est autre que l’ancien Couvent de la Visitation inscrit à l’inventaire des Monuments Historiques qui contemple Nice depuis près de 400 ans. Bien que déconsacré et désormais dénommé Hôtel du Couvent, il se propose néanmoins de renouer avec son hospitalité et de servir de lieu de communion avec la ville et ses habitants. Au delà d’accueillir, comme autrefois, une boulangerie, une herboristerie ou des jardins nourriciers, le nouvel ensemble se dote d’un centre de documentation dédié à l’École de Nice et accueille chaque samedi à l’ombre des orangers de sa cour pavée les étals d’un marché de producteurs de l’arrière-pays.

« L’Hôtel du Couvent pensé dans ses moindres détails pendant plus d’une décennie par Valery Grégo, n’en est pourtant qu’à ses tout débuts mais ses promesses sont à la hauteur de son extraordinaire décor tout en retenue et justesse signé du duo Festen »

L’Hôtel du Couvent pensé dans ses moindres détails pendant plus d’une décennie par Valery Grégo, n’en est pourtant qu’à ses tout débuts mais ses promesses sont à la hauteur de son extraordinaire décor tout en retenue et justesse signé du duo Festen. On avait déjà connu la paire ou plutôt le trio, puisque là encore ils sont assistés dans la mise en musique et en images par Antoine Ricardou du Studio ASL aux Roches Rouges de Saint-Raphaël. Déjà, nous avions pressenti que se dessinait alors une nouvelle forme d’hôtellerie portée par la recherche de sens et de vernaculaire, l’imprégnation dans la culture et les traditions locales, faisant de la justesse et de la cohérence à tous les niveaux une nouvelle valeur de l’hospitalité, ce maitre mot qui trouve ici tout son sens. Le Couvent bénéficie de cette même idée brillante et louable prévalant sur le reste, clivante parfois comme dans le choix de ne présenter que des vins natures à sa carte ou de bannir les télévisions, dieu merci, de ses 88 chambres et suites pour certaines au-delà du spectaculaire qui ont remplacé les anciennes cellules moniales des clarisses, collettines, capucines ou autres visitandines qui ne les habitent plus mais qui y ont laissé leurs noms pour en distinguer les catégories. Les références à l’univers conventuel sont bien entendu ici multiples, littérales ou suggérées. Valery Grego et ses équipes ont parcouru la France entière à la rencontre des différentes congrégations et de leurs villégiatures pour tenter d’en rendre compte ici avec autant d’acuité que de modernité.

« L’espace parfois, la mise en scène souvent, produisent à l’Hôtel du Couvent des miracles ou du tout moins de fulgurantes évidences à tomber en pâmoison  »

On ne pouvait rêver meilleur partenaire que Festen pour traduire cela dans les intérieurs rénovés et repensés dans les règles de l’art par Studio Mumbai et Studio Mediterranée. Les soeurs qui avaient bâti elles-mêmes l’édifice principal à base parfois de pierres, de tuiles ou de bois récupérés du château voisin n’en reviendraient pas tant la rigueur a trouvé ici une forme de luxe dénué de toute ostentation. L’espace parfois, la mise en scène souvent, produisent à l’Hôtel du Couvent des miracles ou du tout moins de fulgurantes évidences à tomber en pâmoison comme devant les bouquets d’une opulence et d’une poésie déconcertantes de chez Mège Père et fils spécialement formé à la floraison des lieux. Comme dans tout lieu de culte, la vérité se cherche et se trouve ici entre exubérance et retenue, entre la richesse du décor intérieur et l’anonyme sobriété des extérieurs. Ainsi, le banal porche donnant sur la rue, la cour intensément minérale, la calade de terre menant à la colline, les facades dépouillées, les longs couloirs rappelant l’austérité première et séculaire des lieux ne laissent en rien présager de la multitude d’attentions et d’éléments décoratifs ponctuant les intérieurs.

« Hugo Sauzay et Charlotte de Tonnac font oeuvre de justesse et de clairvoyance avec l’Hôtel du Couvent, prouvant une fois de plus leur talent à laisser parler les murs et les volumes, »

Cela commence dès l’entrée franchie ave cette fenêtre entrouverte sur une cuisine de campagne fleurant bon le café chaud et les madeleines au miel encore tièdes tout juste sorties du four et attendant les premiers hôtes reçus au détour d’une table en pierre sous la glycine dans l’idée d’une conversation chaleureuse et joyeuse. Si les réceptionnistes continuent d’élire domicile par confort sur une table de presbytère, l’équipe des concierges emmenée par Nicolas reste mobile dans cette réception grande ouverte sur l’extérieur qui à elle seule se vaut la quintessence du travail remarquable des architectes. A l’instar des Roches Rouges mais aussi de Chateau Voltaire plus récemment, Hugo Sauzay et Charlotte de Tonnac font oeuvre de justesse et de clairvoyance avec l’Hôtel du Couvent, prouvant une fois de plus leur talent à laisser parler les murs et les volumes, à ne les parer que de l’essentiel, ici une icône ou une médaille miniatures, là une tapisserie ou une oeuvre d’art monumentales, quelques bustes inspirés par l’antique et une multitude de bouquets extraits d’un Paradis perdu. Partout s’exprime le même sens du détail confondant d’intelligence. Rien n’est ici appuyé ou grossier, tout est légèreté et à propos. On en veut pour seul témoin le set d’écriture et les citrons cueillis du jour disposés en chambre. Quelque soit cette dernière, une intention idoine comme une attention particulière ont été de mise. Évidemment, les suites signatures volent la vedette à toutes les autres et appellent à toutes les dévotions, chacune ayant son charme particulier : un balcon sur la ville, un jardin d’agrément, une vue sur la Méditerranée, un escalier intérieur, un piano de chef, une salle à manger privé, des salons de bains mais surtout et aussi des objets de curiosités chinés et choisis avec soin, des livres à foison comme autant de promesses d’érudition propres à raviver cette idée de Grand Tour européen qui animait autrefois les esprits et les cultures.

« À n’en pas douter, Nice est revenue, avec cet Hôtel du Couvent sur le devant de la scène. Sur une carte de France toujours un peu moribonde, la Cité des Anges redevient désirable »

À n’en pas douter, Nice est revenue, avec cet Hôtel du Couvent sur le devant de la scène. Sur une carte de France toujours un peu moribonde, la Cité des Anges redevient désirable, des premiers beaux jours à l’arrière saison bien sûr mais aussi le reste de l’année car l’Hôtel du Couvent réserve bien des surprises. En plus d’un couloir de nage en acier de vingt mètres (assez incongru) dominant la ville et la Méditerranée, l’hôtel abrite également de somptueux et impeccables thermes romains dotés d’une seconde piscine communiant avec le ciel, d’un tépidarium, d’un caldarium mais aussi d’un frigidarium et de ce que les Romains appelaient l’unctuarium, ces salles des huiles où sont désormais dispensés des soins faisant la part belle à des produits uniquement naturels et développés par des femmes.  Une recherche de vérité que l’on retrouve côté cuisine, qu’il s’agisse du restaurant du cloître, de la guinguette du jardin ou du bistrot de la rue des Serruriers à venir. La cuisine y est des plus simples et s’impose elle aussi comme une évidence loin de tout maniérisme et de toute affèterie liée à la mode et aux diktats. Cela fonctionne très bien la plupart du temps, parfois cela surprend ou frustre mais c’est ainsi. La cohérence ici prime sur la différence de même que naturalité et sapidité font oeuvre commune. Le chef, Thomas Vetele, est mis au défi depuis des mois de ne pas faire preuve de savoir et délivrer une cuisine sans intention ou démonstration inspirée des fruits et légumes provenant de la ferme de l’hôtel à Touët-sur-Var ou de la criée du jour et fortement influencée par les traditions locales.

« Les belles idées se bousculent à l’Hôtel du Couvent et dans ses chambres qui n’en finissent pas de charmer voire de renverser la table (...) Chacune déploie des trésors d’élégance et de rareté loin des standards pour une expérience immanquable. »

L’Hôtel du Couvent s’est donné cette double mission de préservation et de transmission et ce à tous les niveaux. La splendide herboristerie ciselée par Festen sous les arcades du cloitre et menée par Gregory Unrein est un exemple parmi tant d’autres de cette heureuse et salutaire entreprise. Ses tisanes aux noms et parfums évocateurs demeurent aussi inoubliables que les irréprochables petits déjeuners servis à la carte, n’en déplaise aux amateurs d’inconvenants buffet, que les produits de toilette parfumés à l’armoise, ambre et vétiver ou que le mini-bar divinement achalandé en produits locaux. Que dire des médailles sur les portes de ces cellules qui n’en sont plus, l’une priant de ne pas déranger, l’autre de faire la chambre, de la fraicheur des sols en tomette, de l’élégance des couvres lits en lin grège ou azur, des tables basse tendues de tapisseries anciennes, des armoires sur mesure qui grincent comme le feraient celles des grands-mères, de ces robes chasubles réalisées avec des draps recyclés. Les belles idées se bousculent à l’Hôtel du Couvent et dans ses chambres qui n’en finissent pas de charmer voire de renverser la table comme l’iconique et muséale Suite du Chapitre, l’unique Suite du Séchoir tout en longueur, celle de la Tour planquée sous les mansardes, la très bien nommée Très grande suite et ses 165m2, la bucolique Jardin Marguerite avec ses deux chambres et son jardin privatif… Chacune déploie des trésors d’élégance et de rareté loin des standards pour une expérience immanquable.

« À l’Hôtel du Couvent, ce sont la quiétude et la sérénité qui règnent en maître, de la cour des orangers aux restanques classées. »

Si parfois au détour des balcons ou des coursives, les clameurs de la ville se rappellent au souvenir, ce sont la quiétude et la sérénité qui règnent en maître, de la cour des orangers aux restanques classées. Il faut s’y réveiller au moins une fois au son des Laudes et du chant des oiseaux, pousser les volets restés mi-clos, laisser cette lumière du sud filtrer à travers les rideaux de coton blanc, marcher pieds nus sur les tomettes, s’étirer sous le ciel de pluie d’une douche en marbre frais, se laisser gagner par l’envie d’un petit déjeuner sur nappe à l’ombre du cloitre, grimper au jardin contempler les dernières pousses des légumes et des aromatiques servis plus tard au déjeuner sous les canisses de la guinguette, profiter de la matinée pour piquer une tête avec les clochers de Sainte Rita et du Gesu en point de mire et au loin la Méditerranée, se faire surprendre par le coup de canon tiré comme chaque jour à midi pile, laisser filer l’après midi à l’ombre des oliviers un bréviaire des temps modernes à la main avant un parcours revigorant et un massage aux thermes, s’impatienter de l’heure de l’apéritif et d’un diner aux chandelles en terrasse avant de se glisser à nouveau sous les draps et de se promettre d’autres lendemains qui chantent.

« Voila un hôtel qui fait du bien, au corps comme à l’âme, qui réjouit autant qu’il apaise, qui redonne la foi dans un monde meilleur où le bon et le beau peuvent continuer à dialoguer, où toutes les formes de natures et de cultures peuvent trouver à s’exprimer »

Voila un hôtel qui fait du bien, au corps comme à l’âme, qui réjouit autant qu’il apaise, qui redonne la foi dans un monde meilleur où le bon et le beau peuvent continuer à dialoguer, où toutes les formes de natures et de cultures peuvent trouver à s’exprimer et ce pour les générations à venir, un lieu nouveau pour ceux qui veulent encore être émerveillés et inspirés. L’Hôtel du Couvent n’a rien d’un coup financier ou d’un placement patrimonial. Assorti d’un bail emphytéotique, il se veut tout d’abord un emprunt à la communauté et au-delà de çà, le projet de vie personnel presque sacerdotal de son nouveau locataire qui aime à citer cette Lettre aux Hébreux chapitre 13 « N'oubliez pas l'hospitalité : elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges. » Ite, missa est !

Mots : Patrick Locqueneux

Images : Patrick Locqueneux & Olivier Chevalier

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À partir de 390€/nuit

Accueil personnalisé • early check-in & late check-out selon disponibilité • surclassement selon disponibilité • petit déjeuner • 100$ credit

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