Back from… Six Senses Rome

Veni, vidi, vici !

Pour sa première incursion en milieu urbain, Six Senses aurait pu faire le choix de rester fidèle à l’ethos de la marque et se mettre en retrait de l’agitation de la ville, réservant à ses pensionnaires un de ces territoires plus ou moins vierges qui ont fait sa réputation jusque lors à l’instar d’Aman. Mais tant qu’à s’exposer et gagner en visibilité, autant marquer les esprits et investir le tissu urbain en son cœur comme l’on fait avec le succès que l’on sait, Aman Tokyo ou Cheval Blanc Paris pour leur première tentative respective de resort urbain.

« C’est dans le coeur névralgique de Rome, sur la Via del Corso, à quelques mètres de quelques uns des plus grands monuments et palais de la ville que Six Senses Rome a ouvert grandes ses porte »

C’est donc dans le cœur névralgique de Rome, sur la Via del Corso, à quelques mètres de quelques uns des plus grands monuments et palais de la ville, de la Villa Doria Pamphili au Palazzo Colonna en passant par le Monument à Victor Emmanuel II ou la Fontaine de Trevi que Six Senses Rome a ouvert grandes ses portes, obligeant ses chasseurs les jours de grande affluence à interrompre le flot ininterrompu de touristes pour laisser passer ses heureux résidents qu’ils arrivent à pied ou en voiture comme s’il fallait mériter l’oasis promise à l’intérieur de ses murs épais, promesse à moitié tenue avouons le d’entrée.

« Assurément ce Six Senses Rome marque une rupture pour la marque, la ville comme l’époque. »

Passé le premier cordon de sécurité, traversé la Piazza di San Marcello servant également d’entrée à l’église mitoyenne du même nom dont la marque à pris en charge l’éclatante restauration, pénétré dans le hall signé de la papesse du design italien Patricia Urquiola, on s’interroge sur l’identité comme la destination des lieux surpris par la froideur comme le manque flagrant d’intimité d’un espace quasi vide éclairé, à l’instar de tout l’hotel, à la seule lumière aussi électrique que directe de plafonniers cinglants. L’accueil empressé et chaleureux à cet endroit (mention spéciale pour Judith) contraste étonnement comme la réception sur estrade où chaque nouvel arrivant se voit proposé de sonner la cloche des sentiments de son choix, Rome et Six Senses obligent, avant d’être conduits dans l’atrium pour un check-in certes assis mais au milieu de la déambulation des visiteurs et autres résidents passant de la terrasse au bar ou hésitant entre l’un ou l’autre des “food corners” faisant office de restaurant et servant d’agora moderne. On a connu parcours plus fluide et plus heureux.

« Ce Six Senses Rome fera date sur la forme comme sur le fond »

Dans un aréopage de plantes vertes jouant les paravents de fortune quelques éléments d’architecture éparpillés au sol tels d’anciens objets de fouilles abandonnés à la hâte, ici un pied, là une tête ou un chapiteau, nous rappelle le passé glorieux de cette ville-musée à ciel ouvert. Bien qu’on comprenne l’objectif clairement revendiqué, on s’interroge sur l’a-propos de pareil espace volontairement déconstruit et insolemment bruyant à ce niveau d’hôtellerie et de positionnement tarifaire. Assurément ce Six Senses Rome marque une rupture pour la marque, la ville comme l’époque. La maison mère IHG n’est sans doute pas étrangère à ces choix déroutants et à cette tentation de vouloir élargir la cible de ses prétendants pour qui le luxe n’obéit plus aux mêmes codes

« Ces tabernacles d’un genre inédit à Rome comme en Italie redéfinissent indubitablement les standards en cours jusque là, prouvant que la singularité et la cohérence d’un propos payent toujours. »

Pour autant, ce Six Senses Rome fera date car tout d’abord on avait pas vu pareille ouverture en territoire romain depuis fort longtemps sur la forme comme sur le fond. Ensuite, parce que la qualité du produit chambre se veut aussi remarquable que son style est minimal. Enfin, parce que certaines de ses prestations à l’instar de son rooftop ou de son spa vont définitivement marquer les mémoires. Mais revenons aux 96 chambres et suites de ce palais retrouvant son lustre au détour d’impressionnants couloirs feutrés desservis par un escalier de marbre pour le moins monumental. Qu’elles soient dépourvues de vues ou que leur terrasses privatives surplombent l’église, le Corso ou les venelles voisines, elles font toutes grande impression. Renouant avec la Rome Antique, son épure et son raffinement, tutoyant la plus grande modernité, sa rigueur et sa fraicheur, ces tabernacles d’un genre inédit à Rome comme en Italie redéfinissent indubitablement les standards en cours jusque là, prouvant que la singularité et la cohérence d’un propos payent toujours.

« La manière de Patricia Urquiola d’assembler les techniques (...) de moderniser la représentation de l’Antique tourne autant à l’évidence qu’elle fait sens.  »

La manière de Patricia Urquiola d’assembler les techniques du « suco », du « terrazzo » ou du « travertino », de moderniser la représentation de l’Antique tourne autant à l’évidence qu’elle fait sens. On aime ses juxtapositions comme ses raccourcis, ses colonnes tronquées en tables de chevets, ses photographies de statuaire aux airs d’hologrammes asymétriques, ses vases, coupes et autres ciboires en terre cuite et aux allures d’objets de fouilles, ses sculpturales copies de vestiges découpées au laser et posées à même le sol faisant fi des conventions. Aussi belle et réussie soit l’enveloppe, elle ne serait rien si elle n’était servie de manière superlative. Ici, les produits d’accueil sont pléthore, le minibar se veut inclus et accessoirement bien garni, glace et citron sont à disposition pour jouer soi même au barmaid, les cafés et le chocolat bio s’embarrassent du choix, des “spuntini” et des jus fraichement mixés jouent les accueils aussi gourmands que légers.

« Nous sommes bien chez Six Senses, tous les sens ont leur importance à commencer par le goût »

Nous sommes bien chez Six Senses, tous les sens ont leur importance à commencer par le goût ici plutôt bien servi avec une carte de restaurant pour l’heure assez courte mais pour autant pleine d’à-propos, distillant les grands classiques de la cuisine italienne avec le twist et le goût de l’époque. L’idée de “food court” n’en est encore qu’à ses balbutiements et tient plus de l’amusement pour l’heure que d’une proposition consistante, les étals faisant encore un peu de la figuration mais tout cela devrait rapidement trouver sa vitesse de croisière au même titre que le rooftop Notos prochainement ouvert et qui deviendra, avant que d’autres ne lui volent peut-être un jour la vedette, l’un des plus séduisants à la ronde, offrant une vue spectaculaire sur la ville, celle-ci déroulant ses charmes sur 360 degrés.

« Six Senses Rome réserve d’autres atouts bien cachés à commencer par son spa »

Contrairement à la Soho House de Rome elle aussi nouvellement ouverte et sur laquelle nous reviendrons, celui ci n’offrira pas de piscine en plein air mais Six Senses Rome réserve d’autres atouts bien cachés à commencer par son spa situé deux étages sous terre et accessible par un spectaculaire escalier encadré de vitraux non moins sensationnels. En guise de spa, il s’agit plutôt de thermes romains qui attendent les heureux pensionnaires qui auront pris soin de réserver par avance leur créneau. Tepidarium, caldarium et frigidarium sont au centre de ce complexe intimiste à l’allure folle, savoureux mélange d’inspirations entre Rateau et Zumthor. Véritable prouesse esthétique, cette nouvelle version du bain romain aux murs gravés de feuilles de laurier rallie tous les suffrages. Complété d’un sauna, de hammams multiples, d’espaces de yoga, méditation ou biohacking, de salles de soins bien sûr et d’un ce ces “Alchemy bars” qui font désormais la réputation de Six Senses, ce centre de bien-être qui n’a rien d’ordinaire justifie à lui seul une visite.

« Réussissant l’habile pari d’offrir à la fois la Rome classique à sa porte et la Rome contemporaine en son coeur, il donne à la ville comme à son public un tour aussi nouveau qu’immanquable. »

On l’aura compris, si Six Senses Rome se cherche encore par certains aspects, une fois son concept disruptif assimilé, il ne peut qu’incontestablement séduire à condition de pouvoir y mettre le prix. Réussissant l’habile pari d’offrir à la fois la Rome classique à sa porte et la Rome contemporaine en son cœur, il donne à la ville comme à son public un tour aussi nouveau qu’immanquable.Veni, vidi, vici !

Mots : Patrick Locqueneux

Images : Patrick Locqueneux & Olivier Chevalier

resort

À partir de 1.100€/nuit

Surclassement selon disponibilité • early check-in & late check-out selon disponibilité • 100$ de crédit • petit déjeuner • accueil personnalisé

 
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