Back from… La Route du Sud, Maison Rouge
En route pour le Sud !
À l'étape précédente de cette Route du Sud dont voici le troisième volet, il importe de quitter la palmeraie d’Akka en temps et en heure car il reste encore beaucoup à voir de ce parcours défiant l’imagination, alternant couleurs ineffables, arbres isolés comme pétrifiés en silhouettes tourmentées et défilés chaotiques aux folles proportions. Au moins 80km de piste avant d’arriver à destination, dans ce petit village de la région d’Issafen encerclé de géomorphosites spectaculaires, au moment même où, pour la seconde et dernière fois de la journée, les seguias en dévalant les massifs sont remises en eau. Le timing d’arrivée ne doit bien évidemment rien au hasard car cet instant a été voulu à comme une respiration propre à étreindre le cœur et à libérer aussi bien le corps que l’esprit.
La route a été longue et encore plus riche en émotions. Quitter la voiture arrive donc comme un soulagement et gravir à pied encore quelques centaines de mètres, accompagné du bruissement de cette cascatelle avec les derniers rayons du soleil dardant entre les crêtes rougeoyantes, s'avère la plus heureuse des promenades. On éprouve à cet instant l’étrange sensation et l'heureuse illusion d’arriver au bout du monde comme au terme de ce voyage et dont la Maison Rouge serait le dernier rempart contre la civilisation laissée en contrebas. Si les pierres sèches et rouges de ces hauts murs s’harmonisent à la perfection à la minéralité extérieure, si ses terrasses arides appellent un panorama saisissant à 180°, l’intérieur de cette maison, à la fois orientée vers le dehors et tournée sur elle-même autour d’un patio, renvoie au contraire à l’univers d’un lettré conscient de la beauté du monde à laquelle il chercherait à échapper
Si les Arganiers se voulaient harmonie villageoise, l’Oasis terre de contrastes africaine, la dernière de ces Maisons signée du Studio KO se réclame encore différente. Vieux gramophone que l'on a de cesse de faire tourner à l'heure de l'apéritif, livres et cartes en pagaille que l'on dévore au coin des lampes, malles de voyages emplies de souvenirs et de jeux de sociétés pour la fin de soirée, vasque de paquebot pour la toilette du lendemain, mobilier chiné et dépareillé, artefacts et collections diverses ayant le rouge en commun, colonisent en toute rigueur cet antre d'un autre âge dont les cimaises se tapissent de paille tressée et les plafonds s'ornent de motifs tataouis. Une fois de plus, tout se veut exquis. Cette Maison Rouge, peut-être plus que les autres, invite à la contemplation, au repos et à la paresse, elle procure une envie irrépressible d'y rester, à une table d'écriture ou lové dans le lit d’extérieur avec pour seul témoin, ce paysage quasi lunaire tout autour.
Que ne voudrait-on pas continuer à être enivré par les effluves de cuir et de bois, bercé par les appels au loin du muezzin suivis des psalmodies du Coran montant de ce village où seuls femmes. et enfants vivent encore. Cette tendre et enveloppante mélopée se perdant dans une nuit où s'invitent les étoiles filantes nous rappelle étrangement que celle à suivre dans le désert au milieu des dunes aura le silence pour cadre. Aussi, quand le lendemain, l'on contemple de la terrasse les mules dévalant le chemin du retour avec leurs malles sur le dos en direction du village, on en viendrait presque à courir derrière pour être sûr de ne rien perdre des nouvelles aventures à venir. Chaque jour l’excitation du renouveau, l’envie d’être surpris encore et toujours se font plus fortes et chaque jour la récompense s’avère supérieure à l’attente. Sur la route menant d’Aoujou à l’Ighrem d’Aït Kine, étape intermédiaire de ce nouveau périple, la voiture se faufile à nouveau entre les courbes des oueds asséchés et les failles de la montagne qui expose au soleil sa colonne vertébrale comme son dos remarquablement plissé ou tacheté par endroits d’impacts d’un autre âge. La dernière oasis passée, il faut à nouveau quitter la route et bifurquer sur la piste pour découvrir au milieu des champs où les femmes s'activent sous un soleil de plomb, ce grenier légendaire toujours en activité.
Mais avant d'en découvrir ses chambres encore accessibles par des échelles de troncs de palmiers sciés, l'un des anciens de ce village préservé faisant office de gardien a prévu la visite d’une de ces maisons du 18ème siècle aux murs de pisé et aux allures de palais. Le temps que les butlers puissent dresser dans la cour du grenier et à l'ombre du figuier, la table toujours impeccable d'un déjeuner à savourer cette fois assis et à ciel ouvert. Celui-ci s'avale curieusement plus vite que les autres car à Aït Kine, l’appel des premières dunes se fait déjà sentir et la route est encore longue avant de rejoindre la prochaine étape du Camp Nomade installé aux avants postes de Foum Zguid, sur les rives désertiques du lac Iriki...
Mots : Patrick Locqueneux
Images : Patrick Locqueneux & Olivier Chevalier
À partir d’env. 6.000€/pers. (de 1 à 3pers.) ou 5.000€/pers. de (4 à 6pers) • Formule tout inclus : transferts aéroports de Marrakech ou Agadir, 4x4 avec chauffeur et butler sur la route, tous les repas et collations, boissons (sauf champagne), excursions, 2 massages/personne...