Back from… Le Barn
De quoi devenir fan !
On avait décidé que Le Barn serait la meilleure idée de l'année ! C'est dire à quel point on aurait voulu qu'il soit à la hauteur de sa promesse et même au-delà ! Que n’aurions-nous pas aimé y trouver tout ce qu’on avait en mai dernier projeté, fantasmé, désiré du plus profond de notre âme d’urbain en mal de nature. On avait rêvé encore plus beau et pas forcément aussi grand, on avait espéré se retrouver entre soi sans être à "boboland" et comme souvent, en bon parisien, on avait eu envie de tout et de son contraire.
On souhaitait surtout trouver là le refuge tant attendu, le passage obligé de tout week-end pour toutes les saisons. On pensait trouver un hôtel aux airs de maison, une récréation sans faux air de centre aéré. Mais on croyait aussi que l’été ne toucherait pas à sa fin, que la jeunesse serait éternelle et que les rêves étaient faits pour se vivre. Il y avait là une forme de naïveté et puis cette propension à croire que les ouvertures ne devraient se faire que lorsque tout était fin prêt, que chacun avait le doigt sur la couture du pantalon, que le chef avait la toque bien vissée sur sa tête, que les derniers plâtres avaient été essuyés par d’autres et que la nature avait vraiment repris ses droits. On savait pourtant que tout cela n'avait que peu de chance d'arriver et que les premiers temps sont toujours réputés difficiles.
Mais quand l’attente est trop forte, l’envie trop pressante, on s’emporte plus vite et l’on s’attarde sur ce qui ne va pas dans ce sens que l’on imagine être le bon comme sur ce qui ne trouve pas encore sa place. Alors, inévitablement, en arrivant au Barn en juin dernier, on s’est étonné des fortes pluies de mai ayant laminé les abords, des plantations en souffrance ou des espaces encore en attente à l‘image du potager bio tant attendu. On s’est agacé des balbutiements du service comme de la carte un peu courte, on s’est impatienté de ne pas pouvoir réserver le pique-nique tant désiré et d’entendre que la cuisine était prise de court. On a regretté l’absence de piscine, ce que l’on savait déjà, mais on a surtout cherché en vain l’environnement bucolique où étendre sa serviette ou le matelas d’un transat qui n’avait pas encore été livré.
Comme lors d’un premier rendez-vous, on s'est montré déçu de cette confrontation avec la réalité et de ces premiers instants pour le moins laborieux. Faute d’y avoir trop cru, on s’est senti presque gêné pour l‘autre. À sa place, on voulait fermer la porte qui devait l’être et que l’on laissait toujours ouverte, planter l’arbre qui ne demandait qu’à l’être, enrouler le tuyau d’arrosage qu’on avait laissé là… bref, on voulait que personne ne voit ce qu’il ne fallait pas voir et avant tout qu’on avait peut-être eu tort. Dans ces cas-là, il vaut mieux se raviser et décider de laisser le temps faire son œuvre, car c’est justement lui qu’on était venu retrouver ici, ce temps à prendre et à savourer. Partant de là, la patience des uns et la bonne volonté des autres allaient finir par faire bon ménage. Au Barn, cela commence par l’absence de check-out le dimanche, cette idée pour le moins révolutionnaire et qui n’a pas de prix tant nous avons tous à cœur de prolonger la fin du week-end au-delà du raisonnable. Chez d’autres, le late check-out se vit comme un privilège, gagné de haute lutte, ici, il se donne au-delà de toute espérance. Au Barn, rien n’empêche d’avoir un drink sur la terrasse au coucher du soleil, de grignoter un bout ou pourquoi pas de profiter d’une dernière douche avant de reprendre la route. Que l’on aimerait que cette idée géniale que l’on doit à Edouard Daehn fasse école. Rien que pour cela et pour le prix de la chambre s’affichant la majeure partie de l’année à moins de 150€, Le Barn a, sur le papier, autant de quoi séduire le portefeuille que de s’imposer dans les cœurs. S’il n’était pas si bon marché, on oserait même jusqu’à proposer son remboursement par la Sécurité Sociale car malgré l’imperfection de ses débuts, il y a bien sur ce domaine de 200 hectares une promesse tenue, celle du plaisir infini de pouvoir goûter au grand air.
La simple joie de marcher en pleine nature, de s’enfoncer dans la forêt au milieu des fougères ou sous les chênes, de longer les près où paissent les chevaux que l’on peut nourrir ou monter à loisir suffit à se réconcilier avec ce spin-off des Soho Farmhouse et Sao Lourenco do Barrocal qu’on aime tant. À l’instar des libellules et papillons qui s’y sont donné rendez-vous, William Kriegel, le chantre de l’éthologie du Haras de la Cense, et Edouard Daehn, l’hôtelier du groupe Marugal, ont eu raison d’investir ce bout de campagne à 3/4h de Paris. Cette idée d’un mieux vivre à portée de main et de bourse mérite donc d’être saluée et encouragée au-delà de ses premiers pas hésitants. À l’heure d’écrire ces lignes, près de trois mois plus tard, il y a fort à parier que Le Barn ait enfin trouvé son rythme et pris sa place dans le paysage et le décor pensé, avec l’exigence de simplicité et de fonctionnalité qu’on lui connait par Teamwork et Antoine Ricardou, du studio Be-Poles.
Car si Le Barn se veut un 4 étoiles et a pour vocation de s’adresser au plus grand nombre, les petits détails qui font la différence n’ont pas été oubliés pour autant. L’accrochage judicieux entre portraits de famille chinés, herbiers, cartes postales anciennes, relevés topographiques et tributs divers à la race chevaline vient avec d’impressionnants bouquets champêtres cueillis du matin, les chambres pensées avec une économie de moyens offrent néanmoins un confort parfait entre oreillers en plume, draps en coton égyptien 400 fils, rideaux super occultants en toile Barbour, vaisseliers-bureaux modulables, salles de bains délicieusement retro et gamme de produits d’accueil toujours signée par le Studio Be-Poles. Il y a là un style indéniable, parfaitement en phase avec l’époque et d’un rapport qualité prix imbattable, que l’on opte pour un simple dortoir à 45€ où la très jolie suite-appartement vintage avec barbecue et terrasse ouverte sur les champs offerts au couchant. Si l’on ajoute à tout cela les cannes à pêche, les vélos, la table de ping-pong à disposition, les super cours de yoga en week-end signés Le Tigre, on tient quand même là, quoi qu’on en dise, une occasion aussi unique que bon marché d’aller prendre l’air le temps d’un week-end ou plus, sachant que, autre bonne idée, Le Barn dispose d’un vestiaire pour laisser ses affaires entre deux séjours. De quoi vraiment devenir fan du Barn !
Mots : Patrick Locqueneux
Images : Patrick Locqueneux | Olivier Chevalier
À partir de 149€/nuit (2 nuits min. le week-end) • petit déjeuner