Back from… Palazzo Cristo

Éminemment remarquable !

"Aucun coin de la terre n'a donné lieu, plus que Venise, à cette conspiration de l'enthousiasme. » se réjouissait Guy de Maupassant dans La Vie Errante. Voilà une vérité qui malgré le poids des ans et la masse de tourisme ne saurait être malmenée. !


Venise, la Sérénissime se doit plus que jamais d’être sur la liste de tout voyageur non pas pour une mais plusieurs fois. Heureusement, les Biennales ou les fêtes qui s’y alternent fournissent toujours de nouvelles occasions d’en explorer en pâmoison les méandres comme les richesses qui faisaient autrefois courir l’aristocratie dans ce qu’il convenait d’appeler Le Grand Tour. Loin de moi l’idée de faire ici la liste de ces célèbres et anonymes ayant, au fil des siècles, succombé à ses charmes, au point d’y élire domicile voire d’y mourir, mais tous auraient sans aucun doute rêvé de trouver des adresses aussi élégantes que ce Palazzo Cristo qui vient de faire son apparition sur la lagune.

« Tous auraient sans aucun doute rêvé de trouver des adresses aussi élégantes que ce Palazzo Cristo qui vient de faire son apparition sur la lagune. »

Durant des décennies, il leur a fallu se contenter de vieilles pensions miteuses ou de grands hôtels au charme suranné pour ne pas dire affreusement fané. Quand le design a fait son entrée en ville, timidement tout d’abord avec les Charming Houses de Chiara Bocchini puis plus largement avec le Palazzina G de Philipe Starck, grand amoureux de la ville, on a cru Venise sauvée. Si l’ouverture de l’Aman Canal Grande a confirmé cet élan tant attendu vers une forme de modernité, il manquait encore à la ville qui héberge pourtant tous les deux ans la crème de la création mondiale, d’autres options à la hauteur de ses ambitions. Quand en 2017 nous avions salué le concept de Casa Flora Venezia, nous n’imaginions pas que le Palazzo Experimental, du groupe éponyme, allait investir les Zattere au cœur de cet été ou que ce Palazzo Cristo donnerait au fameux et somptueux Campo San Giovanni e Paolo une nouvelle et incontournable raison de s’y arrêter.

« Nous n’imaginions pas que (...) ce Palazzo Cristo donnerait au fameux et somptueux Campo San Giovanni e Paolo une nouvelle et incontournable raison de s’y arrêter. »

Car c’est là, plus tôt cette année, sur ce que d’aucuns considèrent à juste titre comme l’une des plus envoutantes et tranquilles places de la Cité des Doges que s’est ouvert en toute discrétion, l’hôtel si particulier d’Anna Covre et Frédéric Tubau derrière une discrète façade aux tons orangés et aux volets verts sur laquelle vient mourir le soleil. Difficile de ne pas pardonner à ce dernier pareil épanchement quotidien tant ce petit bijou d’élégance mérite d’être mis en lumière. Si les deux époux ont jusqu’alors été très discrets sur leurs activités comme leurs chantiers auprès d’heureux et riches particuliers, force est de constater que leur dernière réalisation et ambition personnelle risque fort de les placer parmi les « hôteliers » les plus respectés. Car n’allez pas croire que ce Palazzo Cristo fasse cavalier seul bien longtemps. Celui qui a l’altière statue équestre du Colleone par Le Verrochio, l’imposante silhouette de la Scuola Grande et la noble San Zanipolo pour voisins, se verra rejoint d’ici deux ans par le proche Palazzo Rossini et par d’autres en Italie qui devraient former à terme une collection de lieux aussi inspirants que séduisants. Le couple franco-italien aurait tort de s’arrêter en si bon chemin car combien d’hôtels n’aimerions nous pas voir ressembler à ce Palazzo Cristo ? Face à tant de beautés circonscrites en un même périmètre, ils auraient pu se sentir intimidés ou succomber à la tentation du pastiche. Aux façades de marbres polychromes, aux colonnes nouées et aux lions marmoréens, ils ont répondu par la plus extrême rigueur.

« Combien d’hôtels n’aimerions nous pas voir ressembler à ce Palazzo Cristo ? »

Trois appartements aux lignes pures, aux plafonds aux poutres chaulées, aux cimaises de Carrare, aux sols de travertin et aux panneaux de bois vernissés ont ainsi pris forme dans ce palais du 13ème siècle entièrement repensé avec le confort d’aujourd’hui, de la climatisation au chauffage au sol en passant par l’ascenseur. Du somptueux duplex de 3 chambres avec cuisine-salle à manger en rez-de-jardin au plus « modeste » appartement avec fenêtres sur cour, rien n’a été laissé au hasard. Au-delà de finitions en tous points remarquables sur lesquelles on pourrait s’extasier des heures durant, chacun d’entre eux a été voulu comme un modèle du genre avec cuisine suréquipée Miele et Smeg, sanitaires et literie surperlatives, télévisions sous miroirs sans tain, produits d’accueil Santa Maria Novella et David Mallett et linge signé Frette. Dimensionnés de 45 à 120m2, tarifés entre 450€ et 1300€ par nuit, ces luxueux havres n’ont guère que les chambres d’Aman Venise comme point de comparaison possible.

« Ces luxueux havres n’ont guère que les chambres d’Aman Venise comme point de comparaison possible. »

Bien que dispensé de vue sur le Grand Canal, de ponton privé, de spa ou de restaurants in-situ contrairement au Palazzo Papadopoli, le Palazzo Corsi peut toutefois s’enorgueillir, outre ses vues merveilleuses sur le Campo, d’accueillir au rez-de-chaussée voisin la plus ancienne pâtisserie de Venise, Rosa Salva, ou de l’autre côté du canal l’une des meilleures tavernes à "ciccheti" de la ville, la bien nommée Osteria al Ponte. La terrasse de la première aux aurores, le pont de la seconde dans les ors du couchant sont d’impayables observatoires de la vie vénitienne. Le cœur de la vraie Venise bat ici peut-être plus qu’ailleurs, dans le bruit des pas sur les pavés, le tintement des heures ou le ronronnement des "motoscaffi" au loin. Tout Venise semble à portée de main et du regard entre ces lourds volets verts grands ouverts sur ce Campo chevauché par ce Colleone que Ruskin lui-même considérait comme la sculpture la plus éclatante au monde. Anna et Frédéric ont trouvé dans ce tableau vivant, autrefois immortalisé par Canaletto et Guardi, de quoi nourrir leur imaginaire et livrer cette version d’une Venise moderne empruntant à l’Antique sa rigueur et son classicisme.

« Anna et Frédéric ont trouvé (...) de quoi nourrir leur imaginaire et livrer cette version d’une Venise moderne empruntant à l’Antique sa rigueur et son classicisme »

Ordonnancés autour de portiques frappés de la date d’acquisition du palais en chiffres romains et de traditionnels rideaux de cotonnade blanche au tombé impeccable soulignés de touches de noir à l’image des sobres gondoles, les volumes laissent place à d’ incontournables marbres à la palette volontairement réduite pour s’exprimer en mosaïques aux accents dramatiques, à des velours habituellement déclinés des tentures aux chaussons des gondoliers ici fort peu modestement cantonnés à des tapis sertis de bronze ou à des assises couvertes jusqu’aux pieds, à d’obligés miroirs juste biseautés ou à d’immanquables bois entre brutalité et vernissage à l’excès à l’instar de rivas rutilants quand les biens nommés jours Venise se déclinent jusque sur les torchons de cuisines et que des rameaux de corail posés sur les bureaux viennent rappeler les riches heures du commerce de la lagune. Il règne dans ce Palazzo Cristo, au-delà de ce condensé vénitien réchauffé par les notes d’encens de bougies signées David Mallett, un luxe rare et essentiel, habituellement réservé aux plus belles Suites d’hôtels ou aux intérieurs privés les plus sophistiqués. Sans doute parce qu’Anne et Frédéric ont conçu de manière très disciplinée chacun de ces appartements comme le leur. Ils habitent d’ailleurs, pour quelques temps encore, le duplex avec terrasse qui viendra bientôt compléter l’inventaire du Palazzo et se plaisent toujours à recevoir personnellement leurs hôtes, ne se contentant pas de leur laisser, en complément du livre des recettes cultes de Venise par Laura Zavan, la liste de leurs adresses préférées. Car au-delà de son esthétique éminemment remarquable, ce Palazzo Cristo se veut avant tout un « home away» des plus agréables.

Mots : ¨Patrick Locqueneux

Images : Patrick Locqueneux & Olivier Chevalier

home away from home
home away from home

À partir de 450€TTC/nuit

early check-in & late check-out selon disponibilité • accueil personnalisé

 
palazzo-cristo-venise-mrtripper-1.jpg
palazzo-cristo © Mr. Tripper-11.jpg
palazzo-cristo © Mr. Tripper-31.jpg
palazzo-cristo © Mr. Tripper-26.jpg
palazzo-cristo © Mr. Tripper-15.jpg
palazzo-cristo © Mr. Tripper-23.jpg
palazzo-cristo © Mr. Tripper-20.jpg
palazzo-cristo © Mr. Tripper-21.jpg
Précédent
Précédent

Back from… Sinner

Suivant
Suivant

Back from…Amanjiwo