Back from… Public Hotel New York
Public : accessible à tous !
Ne cherchez pas ! Vous ne verrez pas comme partout ailleurs les fameux escalators brulants de mille feux, se refléter à l’infini dans leur boite tout en miroir et menant à l’étage, vous ne verrez pas plus cet étage-réception qui n’en a pas la couleur et où les habituels comptoirs ont été troqués pour des alcôves dans les murs équipés d’Imac dernière génération, où les canapés ont cédé la place à des estrades de bois, où réceptionnistes, concierges, guest relations managers, butlers et autres liftiers ne font plus qu’un ou une « Public advisor », jeune forcément, cool évidemment, sourire aux lèvres, oreillette en position, micro au menton, Ipad à la main prêt à être dégainé comme dans tout Apple Store.
Vous n’admirerez pas plus la fresque de Diego Ribeira accrochée aux cimaises du bar éponyme, ni ne lirez les étiquettes des centaines de bouteilles ou les titres des livres rangés harmonieusement rangés entre deux œuvres d’art dans la bibliothèque surplombant le second bar, lui aussi littéralement pris d’assaut dès le soir venu. Vous ne contemplerez pas la vue exceptionnelle sur les arbres du jardin en contrebas, vous ne vous délecterez pas de ces immenses canapés simplement houssés de blanc qui donnent au style minimal une nouvelle allure follement chic, vous ne vous extasierez pas plus sur les salons et salles à manger privés tirés au cordeau qui exsudent un luxe parfumé aux notes du Labo, concepteur de l’identité olfactive. Vous ne verrez rien des trouvailles éclectiques sélectionnées pour le concept store Trade par la femme de son propriétaire de mari. Vous ne saurez pas non plus qui est assis à l’unique table en ébène de ce hall, qui s’essaye au billard, qui fait la queue dehors pour monter à l’un des rooftops les plus sexy de la ville (plus pour sa vue que pour son style by the way) ou descendre dans l’un des sous-sols les plus fun du moment, qui se presse pour attraper au petit-déjeuner comme à toute heure une des gourmandises de Louis, ou veut s’asseoir même sur un demi tabouret aux tables communes, au bar ou dans la grande salle ouverte sur jardin de la dernière sensation de Jean-Georges Vongerichten, à nouveau chef de cuisine de cette Public Kitchen.
Faute de pouvoir prendre, comme tout journaliste présent durant cette période de pré-ouverture, une quelconque photo des parties communes ou d’une autre chambre que la sienne, il faudra donc me croire sur parole quand je vous dis que checker ici relève du miracle. Vous l’aurez d’ailleurs fait de chez vous et vous aurez déjà en votre possession votre numéro de chambre bien avant de récupérer sur place et dans la seconde votre carte magnétique. Idem pour le check-out que vous ferez vous même à l’aide des fameux Imac en libre-service et de votre Public Advisor devenu votre nouvel ami. Il vous faudra également me faire confiance si je vous dis que célébrités et mannequins font de même et se croisent ici avec vous et moi dans un joyeux mélange car, vous l’aurez compris, tout le monde sans exception veut, à raison, être de ce Public Hotel New York qui n’a jamais si bien porté son nom. Quel Hôtel, luxe compris, ne s’est rendu à ce jour aussi accessible au plus grand nombre. Dans la droite ligne de ses anciens projets déjà révolutionnaires pour l’époque et qui ont constitué la colonne vertébrale du Morgan’s Hotel Group, faut-il encore le rappeler du nom de son premier opus ouvert en 1984, le sémillant et visionnaire Ian Schrager ajoute un nouveau chapitre à sa conquête. Loin de ses errements faciles à Sanya sous la marque Edition (en coopération avec Marriott) ou de la première version de Public à Chicago (aujourd'hui fermé) le démiurge prend tout son petit monde de court et fait mentir les pronostics. Avec ce dernier opus, fort différent de son baroque et génial Gramercy Park, il affole une fois de plus la profession et régale ses clients avec une vision de l’hôtel de demain ou en tout cas d’une de ses futures formes.
Comment ? Tout d’abord avec des tarifs, qui s’ils ne s’étaient pas tant envolés ailleurs ces dernières années ne paraitraient pas si ridiculement attractifs ici. Portés à 150$ par nuit (chiffre insolent dont je vous ai déjà parlé et dont certains d’entre vous se sont empressés de profiter), certes hors taxes et sans petit déjeuner mais avec le wifi le plus véloce de New York (proprement incroyable) pour la période de soft opening se terminant le 30 de ce mois mais se prolongeant tous les dimanches soir à venir ou presque, ils ne font pas de cadeau à la concurrence ! Même à environ 212€/nuit au cours du jour pour une "Queen Room", le reste du temps, la première des 9 catégories dans lesquelles se répartissent les 370 chambres de cette tour sortie de terre en un temps record par les architectes stars Herzog & de Meuron, on ne peut pas parler d’abus mais au contraire de très bonne affaire. Tout d’abord parce que la localisation dans le Lower East Side n’est plus anecdotique et que c’est exactement là, à l’Est, que New York se gentrifie et se réinvente aujourd’hui à l’image de ce qui se passe dans le reste du Monde, multipliant les nouvelles tables et les boutiques indépendantes à chaque coin de rue. La présence, pour ses heureux membres, de la dernière des Soho Houses, la Ludow, à deux blocs de là ou de la figure désormais légendaire du New Museum au coin de la rue ont de quoi rassurer si besoin les moins intrépides.La seconde raison, qui objectivement s’avère quand même la principale pour un hôtel, vient que ses chambres, même pour les plus petites d’entre-elles, à savoir à peine 20m2, sont d’une efficacité redoutable. Évidemment parmi ces « Queen Rooms », on ne choisira pas celles situées du 3ème au 9ème étage donnant sur l’intérieur du bâtiment conçu en L, on prendra comme leurs noms l’indiquent les « Good View » or « Great View » offrant des vues spectaculaires du sol au plafond sur la ville et la pointe sud de Manhattan. Conçues comme des cabines de bateaux frottées à l’esthétique japonaise (dans un esprit déjà vu à l’Americano mais bien moins réussi) avec leurs lits impeccables posés à même le sol, leurs salles de bains de bois façon bambou, leurs cabines de douches aux parois opaques ou translucides offrant la vue sur la ville par une simple pression de bouton, leurs dizaines de prises accessibles dont des USB au chevet, leurs écrans géants équipés d’Apple TV, leurs enceintes Bose Bluetooth, leur canapé d’angle et table ronde (pompés au Standard High Line bientôt chroniqué), leurs plafonds en béton brut, leurs parois de bois et parquets huilés, ces chambres n’ont retenu que l’essentiel avec deux bouteilles d’eau pour seules compagnes dans le mini-fridge et aucun room service mais qui s’en plaindrait ? Et pour peu que l’on opte pour l’un des lofts aux trois baies vitrées XXL ou l’un des 3 penthouses de 50 à 80m2 équipés de salles à manger, de véritables salles de bains, on accède alors, croyez-moi, à une sorte de félicité. Pour les raisons évoquées plus haut, il faudra cependant se contenter des photos d’une « Queen Great View » pour tenter d’appréhender ce que le capitaine du bateau, habitué maintenant à se dispenser de décorateurs et rodé à l’exercice de concevoir en plus de ces hôtels des résidences privées toujours plus exclusives, arrive à concevoir avec ses architectes, dans une économie de moyens remarquable et avec comme seule œuvre d’art et dénominateurs communs à toutes les chambres un miroir italo-baroque brillant de tous ses ors, un tabouret de vacher et une couverture en (fausse) fourrure.
Évidemment, si la salle de sport ouverte 24h/24 ne jouait pas que les figurantes, si un spa et une piscine venaient compléter l’ensemble, on atteindrait alors une forme de perfection à laquelle les jardinets paysagés par Madison Cox, la cuisine fusion toujours emballante de JGV sans parler du public de ce Public contribuent pour beaucoup. N’allez pas croire pour autant que Ian Schrager ait fait l’impasse sur le service, travers souvent reproché à ceux qu’on a communément appelé après lui « boutique-hôtels. Au Public, il y aura toujours un advisor pour vous souhaiter la bienvenue, vous tendre un parapluie en cas d’averses, ou un verre d’eau fraiche et parfumée à disposition. Le luxe accessible pour tous, telle est la nouvelle devise de Mr Ian Schrager.
Mots : Patrick Locqueneux
Images : Patrick Locqueneux | Olivier Chevalier
À partir d’env. 185€/nuit
Surclassement selon disponibilité • early check-in & late check-out selon disponibilité • 1 cocktail/pers • petit déjeuner • accueil personnalisé