Back from… Sublime Comporta
Back to the game !
L'assassin retourne toujours sur les lieux de son crime, nous enseigne le dicton. Il ne se trompe pas, à considérer qu’il se soit agi la première fois d’un assassinat ? Pas vraiment ! Certes, nous avons été un peu durs ou tout du moins exigeants en revenant d’une première visite de ce Sublime Comporta qui par son simple nom, qui n’avait rien de modeste, s’imposait des devoirs et rêvait pour lui d’un costume trop grand à endosser. Sublime, il ne l’était pas à l’époque et il ne l’est pas plus aujourd’hui. Tant mieux, me direz-vous car ce domaine-là ne visait pas à être sacré ou encore moins inaccessible. Non, ce qu’il n’était pas possible de mesurer pleinement autrefois mais que nous pressentions tout de même, c’était cette capacité, cette force individuelle quasi inébranlable à vouloir émerger et s’imposer dans le paysage. Je dis volontiers « individuelle » personnifiant par là ce Sublime Comporta car cet hôtel est avant tout et surtout l’histoire d’un seul homme, un de ces portugais qu’on a de cesse d’admirer ici et de respecter pour leur capacité à se réinventer pour certains ou à se dépasser pour d’autres. Avec Gonçalo Pessoa, comme pour Joao Rodrigues - à qui l'on doit Cabanas No Rio, Casas Na Areia, Santa Clara 1728 ou Casa No Tempo - son meilleur ami et pilote de ligne comme lui sur la TAP en plus de leurs rêves hôteliers un peu fous, il est difficile de ne pas tomber sous le charme. Aussi calme que déterminé, l’homme poursuit son rêve et sa quête de sublime avec une énergie hors du commun.
S’il ne réussit pas à déplacer des montagnes, c’est qu’il déplace ici des dunes de sable à une rapidité fulgurante sur les quelques 7 hectares de ce domaine qu’il a fait sien, il y a 3 ans à peine. Lorsque nous l’avions quitté à la fin de l’été 2015, nous étions loin de nous douter qu’à l’automne 2016, date de cette seconde visite, ses projets d’extension auraient déjà vu le jour et passé leur premier été sans encombre. Nul doute qu’aujourd’hui, à l’amorce d’une nouvelle saison, les derniers détails auront été calés et que les quelques villas à vendre ( jusqu'à 5 chambres) sur la propriété compteront déjà leurs premiers et heureux acquéreurs. Sublime Comporta n’a aujourd’hui plus rien à voir avec cette modeste demeure d'alors sans réel charme et les quelques cinq chambres qui en occupaient les étages. Les jolies Suites fort agréables qui avaient pris leurs aises au jardin, entre les champs de lavandes et quelques herbacées poussant à même le sable blanc, ont en effet été rejointes depuis par des « cabanas » avec piscine et des villas de deux chambres, elle-aussi avec leur joli bassin d’agrément tendu sous les pins. À l’époque, nous avions particulièrement aimé ces « Guest Suites » avec leurs 45m2 d’espace à vivre réparties sur 2 niveaux, notamment celles hébergeant la salle de bains à l’image de celle portant le N°15, dernière de la ligne et donc la plus à l’écart d’entre toutes. Nous n’avions pas trouvé grand-chose leur faisant défaut, le grand canapé de coton blanc, le mini bar, la machine Nespresso désormais incontournable, la baignoire de Corian et la vaste terrasse ouverte sur la nature donnant parfaitement le change ! L’adjonction de touches traditionnelles à l’instar de vieux établis, de tapis ou de "mantas", ces couvertures de laine typiques de la région, ou d’artefacts empruntés à l’Afrique ou à l’Asie formaient là un choix bien plus judicieux et personnel que le 100% design italien déployé dans les « Friends Rooms » ou l’unique « Owner Suite » de la maison principale qui restaient cependant fort agréables à vivre à l’abri de leurs murs blancs et de leurs rondins de bois fort polis.
On ne s’était pas attardé sur quelques imperfections ou péchés de jeunesse ne demandant qu’à être corrigés préférant saluer comme toujours ces si belles initiatives voulant doter la région d’un lieu à la hauteur avec un restaurant déjà plein d’allant, proposant une cuisine inspirée, faisant la part belle aux produits locaux autour d’assiettes soignées et d’un menu doucement tarifé, avec un bar où tester des créations là-encore plutôt réussies, avec un spa, même modeste, avec tout de même au-delà d’une cabine de massage, un hammam, un sauna et un bassin intérieur chauffé ou bien encore avec une piscine extérieure plutôt spectaculaire en surplomb d’un brasero où réunir ses clients et amis lors des soirées plus fraiches. Nous avions simplement souhaité au très entreprenant Gonçalo de ne pas avoir vu trop grand, il était alors seul à assurer les réservations et la gestion au quotidien des lieux, et d'avoir mesuré les droits et devoirs d’une telle entreprise. Se retrouver seul hôtelier à la lisière de cet Herdade de Comporta au nom désormais mythique, prisé des célébrités comme des anonymes en quête d’un refuge à l’écart de l’agitation du monde, imposait de ne pas manquer son pari.
Un an plus tard, Goncalo et son Sublime sont toujours là et plus que jamais les seuls compétiteurs de cet eldorado promis à l’hôtellerie et stoppé dans ses élans par la faillite ayant affecté son propriétaire, la banque Espirito Santo. Pour combien de temps encore ? Nul ne le sait ! Et même si d’autres projets sont bel et bien en cours alentour sur les quelques 60 kilomètres de plages quasi désertes de ces terres enchâssées entre dunes et rizières, balayées par un océan vivifiant et ponctuées de restaurants de plage à la mise encore modeste, Sublime Comporta s’est désormais fait, à défaut d’un prénom, un nom, un nom immanquablement associé à la terre à laquelle il appartient et sert de figure de proue.
Bien sûr, juste à côté, il y a la Casa do Pego et un peu plus loin, du côté de Melides, les spectaculaires Terrasses de Comporta mais ces maisons modernistes à louer ne concurrencent pas vraiment le Sublime comme les résidents l’appellent entre eux en prenant soin d’y réserver une table, l’une des seules correctes de la région. Les « Cabana Suite » d’une chambre ou les « Cabana Villa » de deux chambres, 110m2 pour les premières contre 160 pour les secondes, disposent certes d’une cuisine équipée, d’un salon et d’une salle à manger, d’un bassin et de terrasses individuelles mais les unes comme les autres s’adressent, avant tout, à ceux qui veulent retrouver les services de l’hôtellerie allant de pair avec une certaine promiscuité comme le plaisir de croiser son voisin en enfourchant son vélo pour se rendre au petit déjeuner buffet, au tennis ou au nouveau pavillon de yoga se transformant également à la demande en salle de soins extérieure au spa.
L’ensemble est devenu aujourd’hui un complexe assez spectaculaire parcouru de multiples allées, sillonné par les vélos à disposition, les voiturettes de golf et quelques voitures aussi, il faut le dire, des nouveaux habitants de ces chouettes cabanes aux formes simples et aux toits pentus bien que quelque peu dénaturées par cette décoration signée de Miguel Câncio Martins métissant à la hâte design rigoureux et influences lointaines. Le bâtiment principal abritant réception, bar, boutique, salle de restaurant et de conférences, n’échappe pas à la règle du mélange des styles et du nouveau gigantisme des lieux mais garde toutefois cette idée forte de vacance, de temps disponible et d’invitation à faire une pause. Il y a d’ailleurs ici désormais quelque chose du « village de vacances », de cette terminologie apparue en France dans les années 50 et tombée aujourd’hui en désuétude, lui préférant le terme anglo-saxon de resort.
La future plage privée voulue par Gonçalo sur le littoral voisin, l’alternance hors saison des retraites détox organisées par La Pensée Sauvage, Coneiçao Espada du Sha Wellness, Teresa Barrata ou Lisa Bradshaw pour le pilates confirment le changement de destination de ce lieu singulier comme son affirmation en tant que destination dans la destination. Chouchou de la presse anglo-saxonne le classant parmi les meilleurs hôtels du monde et a fortiori de ce Portugal qu’on ne cesse de vanter à raison, comme de ses clients qui, bien malins, s’y octroient des breaks bienvenus du creux de l’hiver au cœur de l’été à partir de 185€/nuit, Sublime Comporta, pour ne pas dire Gonçalo Pessoa, a réussi son formidable pari d’incarner à lui seul Comporta, la sublime !
Mots : Patrick Locqueneux
Images : Patrick Locqueneux | Olivier Chevalier
À partir de 185€/nuit
Surclassement selon disponibilité • early check-in & late check-out selon disponibilité • 100$ spa credit • petit déjeuner • accueil personnalisé